Ambre
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Goupil - Chapitre II

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Goupil - Chapitre II Empty Goupil - Chapitre II

Message  Méréas Jeu 21 Fév - 0:46

Le grand père revint dans la salle à manger où l'attendait ses non moins dix huit petits enfants. Tous étaient installés autour du fauteuil majestueux du patriarche, qui lui même siégeait devant une immense cheminée ou crépitait un feu aux flammes dansantes produisant l'unique source de lumière de la pièce.
Il portait un large plateau sur lequel étaient posés une vingtaine de tasses empilées, deux larges carafes pleines de lait bouillant et une large coupe de gâteau de grand mère.
Il posa son fardeau sur la petite table basse et distribua à chaque enfant une tasse de lait et un biscuit. Ce n'est qu'une fois tout le monde servit qu'il posa la traditionnelle question.


"Alors, quelle histoire voulez vous entendre ce soir ?

-Goupil ! "
crièrent les enfants en choeur.

"Encore ?

- Ouuuuiiiiii.

- Bon, il était une fois un homme qu'on appelait Goupil. Ce n'était ni le plus fort, ni le plus robuste. Il n'était ni le plus intelligent et non plus la plus fine lame.
Mais il était de loin le plus malin. Car Goupil dans un autre monde voulait dire rusé. Roublard parfois. Malin à coup sûr."


Les enfants s'étaient tus et écoutaient charmés la voix douce de leur grand père. Tous connaissaient par coeur l'histoire du Goupil mais tous adoraient la réécouter. Sans doute parce que Grand père y ajoutait à chaque fois une nuance, une précision, un nouvel événement.

Goupil était devenu par le plus grand des hasards un des proches du plus grand général militaire qui fut : le prince Bénédict d'Ambre.
D'aucun ici bas ne savait ce qu'était Ambre en réalité mais son nom avait pour effet d'inspirer crainte et effroi, grandeur et beauté, respect et paix.
Les histoires racontent que Bénédict ne connut aucune défaite du moins tant qu'il avait conscience de tous les éléments. Il restait un homme et comme chaque homme il avait ses faiblesses mais elles n'étaient pas sur un champs de bataille.

Aussi doué soit-il, il avait un défaut qui le faisait particulièrement enragé : l'absence d'ubiquité.

Certains des plus jeunes enfants tiquèrent sur le mot ayant oublié l'explication du grand père la fois précédente. Il leur répéta sans une once d'exaspération."


"L'ubiquité, dit-il, est le don d'être à plusieurs endroits au même moment. Ce qui aurait été fort utile au prince Bénédict. Ce grand guerrier menait souvent plusieurs conflits dans plusieurs mondes à la fois. Même si il possédait des moyens extraordinaires de communication ou de voyages, il connut quelques défaites à cause de son absence à un moment clef.
Il rencontra lors d'un de ses entrainements Goupil. Cet homme dont on ignore le nom le fascinait au plus haut point car si il était bien incapable d'élaborer d'aussi fines stratégies que lui, montrait un certain talent dans ce domaine mais surtout c'est son intuition qui plaisait à Bénédict. Intuition ou roublardise ou ruse, son trait était difficilement qualifiable. Disons qu'il avait le don de repérer ce qui n'allait pas et trouvait la solution pour y palier."


Les enfants hochèrent la tête d'un air entendu. Depuis le temps Goupil était devenu le centre de leur jeu favori et ils durent se mettre d'accord pour incarner leur héros à tour de rôle.
Le grand père poursuivit en racontant brièvement comment Goupil avait déjoué les pièges de dizaines de généraux ennemis, comment il s'était infiltré dans les cours de grand royaume et à grand coup de subtilité, de flatterie et de charme il avait réussit à faire signer des traités, des démissions ou des actes de guerre.

Rien ne semblait trop insurmontable pour Goupil mais grand père se garda bien de dire que les histoires sont toujours romancées, enjolivées.

"… et voici donc comment Goupil mit à bas le plan machiavélique de terrible roi Kondor.
Bon et maintenant au lit."


Le grand père claqua des mains et les dix huits enfants gagnèrent leur dortoir où il faisait bon dormir. Le silence revenu dans la salle principale, il rangea une à une les tasses vides, balaya les miettes et rapporta en cuisine le plateau chargé.

"J'ignorais que tu avais réussi à persuader Kondor à vendre ses meilleurs chevaux réduisant ainsi sa cavalerie à l'état d'infanterie bien incapable de faire quoique ce soit."

La voix était posée et le grand père la reconnu aussitôt. Sans se retourner il répondit.

"Ce ne sont que des fables général.

- Toutes les histoires ont un fond de vérité."


Le vieil homme se retourna et contempla celui qui avait été pendant près de cinquante ans son général. Le prince Bénédict. Celui-ci n'avait pas changé, le temps coulait sur lui telle l'eau sur les plumes d'un canard. Lui, il le savait, avait vieilli. Il n'était plus que l'ombre du jeune homme qu'il avait été.
Pendant cinquante ans, il avait servi le plus grand des hommes. Pendant cinq décennies il avait affronté des armées, il avait déjoué des complots, il avait organisé des assassinats. Il eu ses échecs mais surtout des victoires qui lui valurent à la fin sa récompense.
Un jour, alors que son corps montrait les premiers signes de la vieillesse, Bénédict vint à lui et lui demanda ce qu'il aimerait en récompense des services rendus.
Il savait que c'était là un immense honneur. Il lui répondit alors :


"Une terre loin des guerres. Une bâtisse loin des conflits. Une femme loin les morts."

Bénédict lui accorda ce qu'il voulait. Il fonda une famille et eu sept enfants. Sa femme mourut en couche du dernier. Ses enfants lui donnèrent dix huit petits enfants qu'il aimait recevoir pendant huit jours une fois l'an.
Demain, frères et soeurs, cousins cousines allaient rentrer chez eux en promettant de revenir l'année d'après chez lui. Il savait, au moins pour les plus grands, qu'ils mentaient. Ils auraient alors un âge où les histoires ne les intéresseraient plus et encore moins la compagnie d'un vieux fou.
Ses enfants lui rendaient visite occasionnellement mais de plus en plus rarement.

Les souvenirs passèrent et il revint au présent, au général.


"J'ai besoin de toi une fois de plus Goupil.

- Je suis bien vieux Général.

- J'ai besoin de ton esprit, pas de ton corps.

- L'esprit est vieux aussi, je suis incapable de battre mes petits enfants aux échecs.

- L'amour paternel te fait perdre.

- Je sais que je ne peux me défausser, que voulez vous ?

- Ambre est tombée, je veux savoir qui et pourquoi."


Ambre tombée ? La nouvelle le poignarda mieux qu'une dague affutée. Bien qu'il n'eut jamais mit les pieds dans la cité mythique il avait apprit à l'aimer, à la respecter et s'était juré de la protéger, ne serait-ce pour Bénédict.

"Dites moi ce que j'ai besoin de savoir."

Le prince expliqua au vieil homme le strict nécessaire, comme il le faisait avant et informa son ancien renard qu'ils partiraient le lendemain lorsque la progéniture serait elle même partie.
Goupil, car s'était bien lui, prépara le strict minimum et fit ses adieux à sa maison, ses terres, et à sa famille par la pensée. Il savait qu'il ne les reverrait plus.
Ils croisèrent un dinosaure ce qui ne manqua pas d'étonner Goupil, il n'y en avait jamais en ces lieux. Comme le prince n'y prêta pas d'attention, il en fit de même.
Le route fut paisible et Bénédict le guida à travers des chemins de traverse tous plus beaux qu'enchanteurs. Goupil se souvient d'un temps ou le prince ne prenait pas tant de précaution.
Il se demanda si c'était par respect pour sa personne ou pour une toute autre raison. Il lui posa la question.


"Je suis heureux de voir tes facultés intactes. Malgré tout le respect que j'ai pour toi, c'est effectivement pour une raison de sécurité que j'emprunte la voix royale.
Les routes d'ombre ne sont plus très sures et une descente aux enfers serait pour l'heure trop dangereuse. Je te veux vivant en Ambre. Donc tu as raison sur les deux points."


Il était familier du voyage à travers les ombres et fut heureux que Bénédict ait choisit le moins pénible. Sa monture était calme et avait le pied sur mais son dos le fit vite souffrir. Bénédict leur imposa cependant un long trajet avant d'accorder une pause pour la nuit.

ils arrivèrent à un hôtel mi-figue mi-raisin entre l'établissement de luxe moderne et la taverne moyenâgeuse. Le contraste était saisissant et Goupil se demandait dans quelle ombre se trouvaient ils alors.

Bénédict loua deux chambres et deux repas. La soirée fut vite passée, en silence, et le lendemain ils reprirent la route.
C'est l'âme en peine que Goupil suivit son ancien général, il n'avait plus le coeur à l'aventure. Il dut prendre sur lui pour supporter l'inconfort du trajet qui dura encore sept jours.

Ils arrivèrent alors aux abords d'Arden. Goupil avait bien sur entendu parler de la splendide forêt, mais à la voir maintenant, on aurait dit un bois meurtrit, calciné.
ils furent rapidement stoppé par une patrouille de Ranger qui reconnurent Bénédict. Ils le saluèrent et à la stupéfaction de Goupil, l'invitèrent à le suivre.
il avait bien sur pensé qu'on les laisserait simplement passé sans demander leur dû.
Bénédict ne fit aucun commentaire et suivit donc les gardes qui les menèrent à travers les arbres sur des chemins pédestres jusqu'à une tente, assez grande, décorée avec goût.
Un homme en sortit et Goupil devina un air de famille sans pour autant être franc.


"Bénédict !

- Julian.

- Bienvenu en Arden, entre je t'en prie."
Julian pénétra dans sa tente et Bénédict suivit de Goupil le trouva assit, pieds sur la table un verre à la main. Il le pointa en direction du vieil homme.

"L'invitation te concernait seul.

- Goupil ne représente aucune danger pour toi, sois en rassuré.

- Goupil ? Soit, servez vous donc."
Le prince resta debout sans rien prendre, Goupil fit de même.

"Quoi de neuf ?

- Rien que tu ne saches déjà. Arden a souffert de l'attaque du chaos et de ces maudits dragons abyssaux. Ambre s'est vue amputer de deux de ses marelles et Random est déclaré mort.
On me veut comme régent mais je dois avouer qui si il y a un temps j'aurais sauté sur l'occasion, aujourd'hui le poste de concierge ne me tente guère.

- Tu es le mieux placé.

- Et toi ?

- Autre chose à faire.

- Mouais, on verra bien. J'espérais te voir avant les autres, ca spécule sec comme tu peux le deviner. J'ai même entendu parlé que Corwin serait derrière tout ça.

- Corwin ? Depuis le temps ?

- C'est ce que j'ai pensé aussi mais faut admettre que Cornouaille et sa Marelle s'en sorte plutôt bien et comme on dit : "cherchez à qui profite le crime".

- Corwin a toujours été fidèle à Ambre.

- Les gens changent.

- Pas toujours.

- Tu penses à toi ou à notre simplet de frère Gérard ?"
[ï]Bénédict ne releva pas l'insulte faite à son frère. Il connaissait les sentiments de Julian envers Gérard.
Goupil resta silencieux mais ne manqua rien de ce court dialogue. Car si les mots étaient rares, les expressions elles étaient nombreuses. Il savait que les princes d'Ambre étaient éduqués à ne pas laisser transparaitre de sentiments mais toujours est-il qu'il était un des meilleurs physionomistes qui soit.[/i]

"Où est Gérard ?

- Avec la flotte.

- Bien.

- Que comptes-tu faire si ce n'est pas indiscret.

- Tu es le régent à présent, tu as le droit de savoir. Je vais renforcer la défense d'Ambre et appuyer notre frère au besoin.

- Parfait, et lui ?

- Je lui ai un jour promis de l'emmener en Ambre.

- Et bien, bonne visite, quoique la ville a perdue de son éclat."


Ils se saluèrent et se séparèrent. Goupil ne demanda pas à Bénédict pourquoi ce dernier avait menti à son sujet. Le prince ne mentait que très rarement et uniquement en cas de nécessité absolue.
Ils sortirent d'Arden sans encombre Julian y veillant. L'arrivée dans la cité été loin d'être ce que Goupil avait pu imaginer.
Tours en ruine, maisons saccagées, rues balafrées, les cadavres jonchaient le sol et des nuages sombres encombraient le ciel. Goupil regarda le prince d'un oeil interrogateur mais ce dernier poursuivit son chemin comme si de rien n'était.
Blasé pensa-t-il.
Ils arrivèrent au château et Goupil se secoua la tête. Il avait du s'assoupir car il ne se souvint pas de la montée de la route principale. Un garde était empalé sur la porte principal et un espèce de griffon paraissait prendre sa place.
Bénédict croisa une jeune femme et lui adressa quelques mots. Puis il parla à un chat avant de revenir vers Goupil.
Un mur devint flou et se transforma en fumée.
Puis ce fut au tour du château de devenir une volupté. Seul Bénédict restait.

Goupil ferma les yeux et les rouvrit. Il se trouvait dans le château d'Ambre mais pas le vrai. Il savait où il était, dans la réplique exacte de la cité Celeste Tyr'Na N'oght.
Bénédict l'avait conduit jusque là. Il regarda ses mains, elles étaient jeunes et pleines de force. Une vie entière fut transformée en souvenir vague, seul restait l'essentiel.


"La Lune va se coucher, nous devons partir."

Bénédict fit volte face et rebroussa chemin et alors que lui et Goupil posèrent leur pied sur la terre ferme du Kolvir, la cité s'évanouit dans la nuit.

"Alors ?

- Mon prince, j'ai vécu ma vie et à l'aube de ma mort, j'ai vu la chute d'Ambre. Etait-ce l'avenir ?

- Non, seulement un possible, racontes moi."


Alors Goupil lui raconta tout ce qui restait de son rêve et il vit Bénédict froncer des sourcils ce qui n'était jamais bon signe.

"Je t'ai amené ici je dois l'avouer par curiosité. Généralement les non ambriens ne survivent pas à la folie qui s'empare de vous.
J'ai toujours su que tu avais un truc mais aujourd'hui je ne comprends toujours pas quoi. Mais peu importe, ta vision confirme la mienne. Ambre va vivre des heures noires.

- Bientôt ?

- Je ne saurais le dire, la semaine prochaine, dans un an, un siècle, qui sait ?
je vais t'envoyer en mission Goupil. Mais cette fois tu ne seras pas seul. J'ai promis à ma soeur Flora une escorte pour l'ombre Eregnor.

- Et vous voulez que je l'espionne.

- Non, cette fois fois, je veux que tu t'en tiennes à ta couverture à savoir la protéger. Mais j'ignore si l'attaque viendra de l'extérieur ou de l'intérieur, tu me suis.


Bien sur Goupil savait parfaitement à quoi le prince faisait allusion. Il voulut continuer la conversation sur leur vision mais s'en abstint. Si Bénédict clôt le sujet, mieux vaut respecter son choix. Il le salua donc et partit de son côté avec cette gêne palpable par ce qui s'était passé dans la cité de la Lune.
Méréas
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