Du côté du Lion (Darla, Elron)

Debout les mains dans le dos, je contemple la vue imprenable qui s'offrent à moi a sur les marches du temple. Mon regard se pose à la fois sur le lointain paysage mais aussi sur les cieux. Je repense à tout ce qu'il s'est passé depuis que j'ai traversé la marelle jusqu'au moment ou j'ai pu remettre le dôme sur la cité. Tant de chose me restent à accomplir que j'ose à peine y penser.
Mon regard se pose sur l'horizon derrière lequel les premières terres de Radiance s'étendent, cette douce ombre si chère à mon coeur rattaché à ma première vrai patrie. Quoi de mieux pour faire mon bonheur.

Sorti de mes rêveries par Jade et Onyx, je les regarde s'amuser inconscient de la position qu'ils occupent déjà dans le multivers de par leur parenté. Au moins auront-ils deux parents qui s'occuperont à vie d'eux directement ou indirectement.

Je regarde Darla plus ravissante que jamais qui pouponne sans se ménager. Je lui souris mais ne peux m'empêcher de penser à Saisei seule, perdue et certainement prisonnière d'Ambre. Ce qui rend mon sourire moins sincère. J'essaie de rattraper ce sourire raté...

"Tu as de merveilleux enfants Darla."

Je suis plongée dans la surveillance contemplative de mes deux petites filles quand Elron arrive, souriant d'abord, puis tirant une drôle de grimace. Mon propre sourire, étudié devant la glace sur les conseils bienveillants de Sance, ne faiblit pas. On sait tous, ici, qu'il était proche de la fille de Dalt, et celle-ci a disparu depuis trop longtemps déjà... Quand on est malheureux, le bonheur des autres est toujours une déchirure. Ne le sais-je pas trop bien, moi qui ai vécu si longtemps dans la peine, la haine, la souffrance ? Je me dois d'être douce et patiente envers ceux qui, comme moi avant, errent dans l'affliction.

Peut-être devrais-je lui proposer quelques entraînements ? Ça défoule toujours, le combat.

- Merci, Elron. Je dois avouer qu'eux et Sance sont des sources intarissables de bonheur.

Disant cela, je pousse un discret "Onyx !" et lance un regard noir qui reprend à l'ordre une des deux jumelles qui commençait à pousser l'autre.

- Et vous, Elron, comment allez-vous ? Ne vous sentez-vous pas trop désœuvré, en ces temps de paix ?

Je reste légèrement abasourdie face à Elron.

*Croit-il donc que Sance et moi-même ne veillons pas sur nos enfants et que nous ne savons pas les éduquer ? De quoi se mêle-t-il ?*

Je sens la colère me monter au nez mais je prends le temps de respirer lentement, de tourner sept fois la langue dans ma bouche, comme me l'a enseigné Sance.

*Allons, Darla, ne t'énerve pas. Ce qu'il dit part d'un bon sentiment, au contraire.*

- Eh bien... c'est fort gentil à vous, Elron. Je prends note que vous proposer vos services de maître d'armes mais ils sont encore un peu jeunes pour cela. Pour l'instant, nous nous concentrons uniquement sur le fait qu'ils aient une enfance heureuse et surtout, protégée. Dieu merci, ici, en Cornouailles, ils sont en sécurité. Le rôle de Sance nous permet d'avoir un logement bien surveillé, et le pays n'est-il pas en paix ? Nous verrons plus tard quant à la dispense d'enseignements propres à forger le corps et l'esprit de façon formelle et intense.

Je m'efforce à sourire en disant cela, puis je continue, sur le même ton :

- Quant à l'absence des parents, nous nous arrangerons au maximum pour que toujours l'un de nous deux soit présent auprès de nos enfants, c'est une chose que Sance et moi nous nous sommes promises lorsque j'attendais nos deux jumelles.

Je marque une pause, puis me confie à mon tour :

- Il est vrai que mon mari, mes enfants me comblent. Mais il y a en moi une part qui hait la trop longue immobilité. Bouger un peu, pour une mission honorable, me ferait le plus grand bien.